Six musiciennes folk oubliées (presque) retrouvées

Il y a quelques semaines, au détour d’un épisode de la très chouette série Easy, j’ai découvert Vashti Bunyan. Dès lors, des forêts enchanteresses se sont ouvertes à moi et ont enveloppé mon hiver de beauté.

Cet article a été publié pour la première fois sur Karoo.me.

Ces artistes sont des incontournables du folk mais pour moi, grande amatrice d’électronique, ce fut une découverte étonnante. J’ose imaginer qu’en les découvrant plus jeune, mon parcours musical n’aurait probablement pas été le même. Alors, tant qu’il nous reste encore un peu de temps pour profiter des brumes hivernales, j’aimerais à tout prix vous les faire (re)découvrir.

Connie Converse est l’aînée de toutes celles que je vous présenterai mais surtout celle qui a connu le destin le plus tragique. Alors qu’elle s’épanouit dans les années 1950 au cœur de la contre-culture new-yorkaise, elle ne parvient pas à se faire connaître. Par dépit, elle rejoint son frère à l’université Ann Harbor, dans le Michigan et tombe en dépression. Elle décide, à cinquante ans, de changer de vie et disparaît, laissant derrière elle quelques traces musicales dont certains morceaux enregistrés dans la cuisine de Gene Deitch. Lorsque ce dernier décide de les faire connaître à la radio, des auditeurs cherchent à les faire éditer, sortant de l’oubli des morceaux composés tout au long de sa carrière et donnant naissance au très beau How Sad, How Lovely, sorti en 2009.

Nous sommes une vingtaine d’années plus tard. L’Anglaise Vashti Bunyan étudie aux Beaux-Arts à Oxford avant de s’envoler pour les États-Unis à sa majorité. Elle décide de devenir musicienne professionnelle suite à sa découverte de Bob Dylan. Repérée par les Rolling Stones, elle sort en 1965 deux EP, Some Things Just Stick In Your Mind et Train Song, qui lui permettent, cinq ans plus tard, de présenter un premier album, Just Another Diamond Day, soutenu cette fois par Simon Nicol et Dave Swarbrick (Fairport Convention), Robin Williamson (The Incredible String Band) et Robert Kirby. Malgré sa qualité, cet album ne connaîtra pas le succès escompté. Elle décide alors de se retirer du monde de la musique et s’installe en Irlande puis en Écosse. Ce n’est que dans les années 2000, alors qu’elle se retrouve citée à de nombreuses reprises comme référence artistique par les artistes indies très en vogue à ce moment-là (Animal Collective, Devendra Banhart, Joanna Newsom, etc.), que le succès vient frapper à sa porte. Cela lui permettra de sortir Love Song (2004), Lookaftering (2005), Heartleap (2014) et (surtout) d’enfin pouvoir les chanter sur scène et ainsi de vivre pleinement sa passion.

Cette révélation en entraînera d’autres puisque cela permettra la mise en lumière de nombreuses musiciennes folk oubliées jusqu’alors.

Sibylle Baier, d’origine allemande, compose dans les années 1970 Colour Green, un album de quatorze titres inspiré de ses voyages européens, diffusé sur une cassette. Bien qu’à cette époque elle apparaisse dans certains films de Wim Wenders  comme actrice ou comme musicienne, elle décide de se consacrer à l’éducation de ses enfants et s’installe dans le Massachusetts. C’est son fils Robby qui, en 2004, fait graver ces morceaux sur CD et en permet la circulation, les amenant aux oreilles du petit label américain Orange Twin Records. Un deuxième album studio est annoncé.

Turid, de son vrai nom Marit Turid Lundqvist, pratique le « Visa », un style musical inspiré des troubadours et propre au folk mais très spécifique en Suède et populaire dans les pays scandinaves. Elle en est l’une de ses représentantes, remportant des concours et ayant l’honneur de quelques apparitions télévisées. Entre les années 1970 et 1980, elle sort neuf albums et deux EP. Son premier album, Vittras Visor, sorti en 1971, est réédité en 2004 et traduit en anglais. Cependant, les informations à son sujet restent rares et ne me permettent pas de vous en dire davantage… Alors le mieux, c’est de l’écouter.

L’Anglaise Anne Briggs grandit à Toton, élevée par son oncle et sa tante à la suite de la disparition précoce de ses parents. C’est à l’occasion d’un voyage en auto-stop qu’elle fait la rencontre d’Archie Fisher, figure de proue du folk écossais, et de Bert Jansch. À Nottingham, à quelques mois de sa majorité, elle se fait repérer par Ewan MacColl qui l’invite à participer au projet Center 42 (festival itinérant visant à diffuser l’art et la culture de Londres dans les autres villes principales de la classe ouvrière de Grande-Bretagne). En faisant la découverte du genre musical Sean-nós song (chants traditionnels irlandais) lors de ses nombreux voyages, elle façonne véritablement son style. Elle sortira alors The Time Has Come (1971), Anne Briggs (1971) et Sing A Song For You (1973, réédité en 1996) mais décide d’arrêter sa carrière musicale et déménage en Écosse.

C’est le compositeur Leonard Rosenman qui encourage Linda Perhacs à enregistrer son premier album, le très beau Parallelograms (1970), pourtant délaissé par son label, Kapp RecordsElle poursuit alors sa carrière de dentiste et ce n’est que lors de la réédition de l’album en 2005 qu’elle trouve la reconnaissance et devient une figure de référence du monde indie (et au-delà puisqu’elle sera également référencée par Daft Punk). Elle sort alors un second album en 2014, The Soul of All Natural Things, et plus récemment I’m A Harmony (2017).

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